Tribune franco-allemande des Parcs, Jardins et Monuments Historiques – Deutsch-Französisches Park-, Garten- und DenkmalMagazin

L’organisation de la protection des édifices historiques en France et en Allemagne (I)

  I.  Les régimes de protection

La protection des édifices historiques fait réellement son apparition en France avec la loi du 30 mars 1887 sur la conservation des monuments historiques et des objets d’art. Consciente  des dégâts créés par les différentes révolutions, l’Allemagne y devient également très sensible. Notamment depuis la Restauration 1815, différentes lois assurent des protections aux monuments historiques. Ceci cependant sans cohérence globale. Un rôle promoteur dans la prise de conscience joue en 1899 les différentes associations d’histoires, telles les « Geschichts- und Altertumsvereine ». C’est finalement la Hesse, s’inspirant du régime français, qui établie le premier une législation plus globale et exclusivement dédiée aux monuments historiques. Depuis les années 1970, un régime complet des protections des monuments historiques est mise en place outre-Rhin.

 L’organisation administrative des deux pays (État centralisé français, État fédéral allemand) se reflète dans la répartition des compétences en matière de protection des édifices historiques. Chasse gardée de l’État français, elle demeure concentrée entre les mains des Länder allemands. Les normes françaises dans ce domaine ont ainsi un champ d’application national, et sont regroupées pour l’essentiel dans le Code du patrimoine. Leurs équivalents allemands sont édictés au niveau de chaque Land, dans sa Denkmalschutzgesetz (« Loi de protection des monuments »).

 Si l’on entre dans le contenu des régimes de protection, plusieurs différences sautent aux yeux entre les deux pays. Tout d’abord, là où la France dispose, comme le Royaume-Uni, de seuils de protection (l’inscription et le classement au titre des monuments historiques), les Länder n’ont pas mis en place une telle hiérarchie.

 Toutefois, tout comme en France, une hiérarchie existe inévitablement en pratique. Les autorités seront par exemple plus sévères quant à une autorisation de travaux portant sur le célèbre Reichstagsgebäude (« Bâtiment du Reichstag ») de Berlin que sur un corps de ferme, alors même que les deux édifices sont soumis au même régime de protection.

 France et Allemagne se distinguent également par la procédure qu’ils emploient pour protéger leurs édifices. La France dispose ainsi d’un système constitutif, ce qui signifie que la protection d’un édifice nécessite un acte administratif : l’arrêté ministériel de classement au titre des monuments historiques ou l’arrêté préfectoral d’inscription au même titre. A l’inverse, les Länder allemands ont presque tous adopté un système déclaratif. L’édifice bénéficie alors d’une protection de par la loi, dès lors qu’il remplit les conditions de qualification de monument posées par celle-ci (intérêt historique, architectural, etc.).

 Le système allemand a l’avantage de protéger en pratique un nombre bien plus important d’édifices. On compte en France environ 43 000 biens meubles ou immeubles inscrits ou classés au titre des monuments historiques. Pour donner un ordre de grandeur, 120 000 biens immeubles sont protégés par la Denkmalschutzgesetz de la seule Bavière.

 Toutefois, ce système déclaratif présente une certaine insécurité juridique pour le propriétaire d’un édifice historique. En effet, il ne dispose pas d’acte administratif attestant de la qualité de monument protégé de son bien. Ceci peut se révéler particulièrement handicapant s’il souhaite y effectuer des travaux, ne sachant pas d’emblée s’il doit ou non demander une autorisation spécifique.

 Enfin, la protection des abords des édifices protégés distingue grandement France et Allemagne. Le Code du patrimoine fixe ainsi un périmètre de protection de 500 mètres autour de l’édifice protégé au titre des monuments historiques. Même si ce périmètre peut être modifié, on peut observer que les Denkmalschutzgesetze font preuve de plus de pragmatisme et de souplesse, ne prévoyant pas de périmètre déterminé.

 Ainsi, là où la législation française relative aux monuments historiques ne pouvait pas servir de fondement pour interdire un projet d’implantation d’éoliennes à quelques kilomètres du Mont-Saint-Michel, la législation allemande équivalente aurait pu être invoquée pour prévenir l’impact négatif de ce projet sur l’apparence extérieure du célèbre édifice.

 Daniel Kempton

Ancien étudiant en droit français, droit allemand et droit du patrimoine culturel, il est l’auteur d’un mémoire sur l’organisation de la protection des édifices historiques en Allemagne, dans une approche comparée avec la France. Le mémoire a été soutenu par une bourse de la fondation de Monuments Historiques (fondation de l’association la Demeure Historique) 

Pour toute question liée à cet article, n’hésitez pas à contacter son auteur par courrieldan.kem@orange.fr

 

 

Régime de protection en Allemagne depuis la réunification

Des d‘études comparatives seraient nécessaires pour inclure aussi les modifications législatives de la protection et les nouvelles initiatives prises par l’Allemagne depuis sa réunification. En effet, ayant eu à son actif une quantité vertigineuse de monuments historiques depuis 1990, l’Allemagne unifiée a dû faire face à une situation historique nouvelle et coûteuse concernant son patrimoine. Elle devait régler la question d’expropriation des anciens propriétaires avant et juste après la guerre, des ventes de ces demeures avec ou sans terrains, imaginer une nouvelle gestion et assurer ainsi la survie de ces monuments. La Treuhand en avait la grande charge côté vente, mais les Nouveaux Länder faisaient jouir aussi leur autonomie concernant le Denkmalschutz. Il fallait de la créative et de la réactivité pour y faire face, beaucoup d’argent et surtout beaucoup de bonne volonté. Si la même situation historique s’était présentée à la France, le scénario aurait été intéressant. Ose-t-on l’imaginer ? Nous en parlerons dans l’un des numéros futurs, des exemples intéressants à l’appui. 

 Bettina de Cosnac (PhD), Réd. en chef de MoNo

 

 

Die Denkmalschutzorganisation in Frankreich und Deutschland (Kurzfassung)

 (Rechts-)Formen des Denkmalschutzes

Historische Gebäude – und Kunstgegenstände – werden in Frankreich erst mit dem Gesetz vom 18. März 1887 wirklich geschützt. In Folge verschiedener Revolutionen, im Zuge der Restauration von 1815, wird auch Deutschland für seine Denkmale  sensibilisiert.  Es erlässt verschiedene, wenngleich recht allgemein gehaltene Denkmalgesetze. Besonders ab 1899 spielen Denkmal- und Altertumsschutzvereine eine Vorreiterrolle bei der Bewusstseinsbildung. Hessen wird als erstes eine exclusive Rechtssprechung für Denkmale durchführen. Seit den siebziger Jahren  gibt es in Deutschland ein umfassenden Denkmalschutz.

Der jeweils spezifische Verwaltungsaufbau  beider Länder (Frankreich: zentralistisch; Deutschland: föderal) spiegelt sich auch im Denkmalschutz wider. Streng dem französischen Staat vorbehalten, unterliegt er in Deutschland der Länderhoheit. Französische Normen und Gesetze, im „Code du patrimoine“ zusammengefasst, gelten in ganz Frankreich verbindlich. In Deutschland erlässt jedes Bundesland seinen eigenen „Denkmalschutz“.

Ein Vergleich der Rechtsinhalte zeigt eine Vielzahl Unterschiede zwischen Frankreich und Deutschland. Frankreich unterscheidet, ähnlich wie Grossbritannien aber im Gegensatz zu den Budnesländern, eine Hierarchie des Denkmalschutzes. Inoffiziell besteht eine solche Hierarchie jedoch auch in Deutschland, je nach Wertigkeit des Gebäudes (z.B. Berliner Reichtstag vs. Bauernhof).

Denkmalschutz ist in Frankreichs Konstitutivsystem ein Verwaltungsakt: eingeschrieben wird auf Minister- oder Präfektenerlass. In Deutschland deklariert der Eigentümer. Erst nach Prüfung, ob das Objekt geltende Denkmalschutzkriterien erfüllt, wird es als Denkmal geführt oder auch nicht. Unterschiede bestehen ferner, was den Umgebungsschutz betrifft. In Frankreich ist er auf 500 Meter beschränkt. In Deutschland wird er pragmatisch und flexibel gehandhabt. Im Falle des Mont Saint Michel und dem heftig umstrittenen Windenergie-Projekt hätte sich die deutsche Rechtssprechung als nützlich erweisen können.

Daniel Kempton

Ehemaliger Student der vergleichenden Rechtswissenschaft (Deutschland, Frankreich) und des Denkmalrechts. Verfasser einer Magisterarbeit über die Organisation des Denkmalrechts in Deutschland und Frankreich. Die Arbeit wurde mit einem Stipendium der  Stiftung der „Demeures Historiques“ gefördert. Der Artikel (1 und 2) ist ein Résumé der Arbeit.

Bei Fragen zum Artikel kontaktieren Sie bitte: dan.kem@orange.fr

 

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